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        Sud Languedoc Magazine N° 8

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        Molière, 400 Ans de lumière sur le Languedoc ?

        La réponse fut laconique : « Les bureaux sont ouverts le jeudi de trois à cinq. » Ainsi fut perdue la
        bonne fortune. Avec quelque retard, les autorités s'inquiétèrent et, ne voyant pas revenir le paysan
        et son étrange équipage, engagèrent la presse à des appels, les préfets à des enquêtes autour de la
        capitale. En vain. « Cette scène se passait il y a environ soixante-dix ans, sous la Restauration... »,
        ajoute notre chroniqueur. C'est dire combien la curiosité des chercheurs était alors excitée par une
        remarquable faim de documents. Corneille, Racine, La Bruyère, La Fontaine et bien d'autres ont laissé
        de nombreux manuscrits. Molière, le grand Molière, quelques signatures, découvertes bien tard. Cet
        homme public, en relation avec tous les beaux esprits de son temps, n'a rien recueilli ni communiqué
        de sa personne ; double singularité qui étonne.


        On exhume toujours les reliques : la maison natale, la maison mortuaire, la mâchoire même, trouvée
        on ne sait plus dans quel cimetière par l'honorable docteur Jules Clocquet, montée sur armature
        d'argent et déposée au musée de Cluny.


        Les fauteuils enfin, dont celui de Pézenas qui, dès 1836, fait l'objet d'une brochure imprimée et jouit
        déjà d'une grande notoriété dans le monde des érudits et du spectacle. Le pèlerinage à Pézenas pour
                       honorer l'illustre cathèdre est à la mode tout au long du siècle, donnant lieu à un rituel
                       aussi pittoresque que celui dont fut témoin le romancier Georges Beaume, alors écolier.
                       « J'étais encore au collège lorsqu'un jour Madame Agar vint dans notre Pézenas jouer
                       Phèdre. À peine débarquée du train, elle exprima l'intention de voir sans retard le
                       fauteuil de Molière. On la conduisit dans la rue Saint Jean, celle où je demeurais, et
                       puis  dans  la  boutique  du  pâtissier  Astruc,  à  dix  pas  de  ma  maison.  Derrière  elle,
                       accoururent jusque dans la cour où les Astruc descendirent leur fauteuil qui dormait
        tout au long de l'année dans un coin de l'atelier, les braves gens du voisinage, le mercier, le drapier,
        le  relieur,  le  marchand  de  chaussures.  »    Au  milieu  de  ces  badauds,  amusés  par  l'étrangeté  du
        spectacle, Madame Agar embrassa religieusement la relique de bois qu'on avait à la hâte nettoyée
        de sa poussière. Elle se mit à genoux sur le siège et, levant au ciel ses bras vigoureux, elle récita de
        sa voix profonde une tirade de vers qui n'en finissaient plus. Sous le mur énorme de l'église, le fracas
        de  ce  verbe  musical  et  tragique  émut  d'une  douleur  nos  âmes  d'ignorants,  et  sans  que  nous
        comprenions très bien la ferveur de cette noble femme, qui pour son dieu pleurait d'amour, nous
        éprouvâmes un sentiment de respect et d'humilité, une sorte de crainte superstitieuse, et, pour la
        laisser seule à ses dévotions, nous nous dispersâmes en silence…


        Ainsi,  au  XIX  siècle,  le  Languedoc  retrouvait-il  Molière  dans  la  célébration  et
        donnait-il  à  son  passage  une  dimension  particulière,  embarrassée  d'inconnus
        ouvrant sur l'imaginaire et détachée des réalités quotidiennes.


        De nos jours encore lors de son 400 éme anniversaire on à donné pléthore de
        cérémonies  théâtrales  célébrant  une  notoriété  Languedocienne  fervente  et
        salutaire pour nos comédiens et metteurs en scène locaux.
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